Présentation (d’après un texte de Gérald Purnelle)
Discrète et délicate, la poésie de Karel Logist ne vocifère jamais ; elle ne cherche ni à choquer, ni à démontrer, ni à convaincre. Entre le chant et la confidence personnelle, avec une constante pudeur, elle mêle humour et gravité, nostalgie et observation. Les thèmes sont tour à tour l’amour, l’amitié, l’enfance, le voyage, l’observation des autres, le portrait ; mais l’œil de Logist décèle aussi l’insolite, ou même le fantastique, dans la réalité ; son imaginaire est propre à construire de petites fables amusées et non moralisatrices ; sa voix jette un voile sur son angoisse ou son scepticisme. C’est une poésie d’humour noir qui ne se montre pas comme telle ; une poésie de connivence avec soi-même et avec l’autre ; le moyen de communication d’un homme secret ; une poésie qui ne cherche pas à en imposer, mais qui s’impose au lecteur – et aux critiques unanimes – par la grande qualité d’écriture dont elle fait montre : le travail de la prose, qui parvient à allier densité et légèreté, et l’art du vers, mélodique ou plus rude, toujours soigneusement mais discrètement pesé.
La reconnaissance dont jouit l’œuvre poétique de Karel Logist à une époque où la poésie n’est guère à l’honneur confirme ces qualités. Il a reçu plusieurs prix de poésie, dont certains décernés par de très importantes institutions (l’Académie Royale de Langue et de littérature française de Belgique, le Parlement de la Communauté française de Belgique, l’Académie française). Il a bénéficié de bourses d’écriture et de résidences d’auteur, qui lui ont permis d’effectuer des séjours à l’étranger (Rome, Berlin). Il a été publié en anthologie alors même qu’il n’avait que son premier recueil à son actif, et dans de nombreuses anthologies depuis, tant en France qu’ailleurs et en traduction (Mexique, États-Unis) – indice d’une reconnaissance qui acquiert un caractère international. Son écriture, dénuée de toute complaisance, est propre à séduire un public divers, ouvert ou non à la poésie. Elle peut donc constituer un appel à un public large vers ce genre parfois difficile d’accès.C’est donc une voix majeure, qui se signale par la qualité constante de son œuvre.
Mais cet écrivain ne se contente pas de poursuivre son œuvre ; il se met aussi au service de la littérature et de l’écriture. Convaincu que le poète doit absolument rencontrer le public, tous les publics, aussi souvent que possible, et faire en sorte que la parole poétique puisse faire mentir sa réputation d’hermétisme, il mène dans ce domaine de multiples activités, qui font de lui un animateur créatif et infatigable de la scène littéraire.
À une époque où les revues littéraires n’étaient plus guère nombreuses, Karel Logist fut en 1998 un des fondateurs de la revue Le Fram, qu’il a animée avec Carl Norac, Serge Delaive, Carino Bucciarelli et Denys-Louis Colaux auxquels sont venus s’ajouter Marc Lejeune et Gérald Purnelle. Le Fram a publié des textes de prose (extraits de romans, nouvelles) et de poésie, en privilégiant l’ouverture sur la poésie de langue étrangère et aux jeunes poètes et écrivains. Cette revue, qui a compté vingt-trois numéros et dont la renommée et le prestige ont grandi en douze ans, exerça donc une fonction essentielle dans le monde des lettres et servit de modèle aux revues plus jeunes apparues dans son sillage. La revue Le Fram se doubla en 2000 d’une maison d’édition qui publia des textes inédits sans préjugés de genre et en s’ouvrant autant aux auteurs n’ayant jamais publié qu’aux écrivains reconnus (le théâtre d’Eugène Savitzkaya, la poésie de Jacques Izoard, des proses de Nicolas Ancion ou encore les romans de Valérie Nimal ou de Véronique Janzyk). La collection compte une quinzaine de volumes.
Karel Logist est également, avec Gérald Purnelle et Yves Namur cofondateur et co-directeur de la collection patrimoniale « Ha ! », publiée aux éditions du Taillis Pré, et qui a pour vocation de rééditer des poètes belges dont les œuvres sont importantes mais peu connues, introuvables, voire inédites. En se vouant à la poésie belge de langue française et à la redécouverte, cette collection est venue occuper une place quasi vacante dans le monde des lettres belges. Elle a publié des poètes aussi importants que Georges Linze, Franz Moreau, Pierre della Faille ou Ernest Delève.
Karel Logist anime régulièrement des ateliers d’écriture poétique, à Liège (avec l’asbl Imaginaction), à Bruxelles et ailleurs. Il y met en place une immersion dans la poésie contemporaine et accompagne les participants sur le chemin de leur propre écriture. Il est en cela conscient que des poèmes dorment en chacun en attendant d’être écrits, et que leur partage fait aussi partie des plaisirs de l’atelier. Il démontre ainsi qu’une activité au départ très individuelle peut trouver sa place dans un espace collectif. Par ailleurs, il se déplace régulièrement, dans le cadre de l’opération Ecrivain en classe, dans les écoles de la Communauté française de Belgique pour y rencontrer des élèves autour de la poésie.
Depuis plusieurs années, Karel Logist s’est consacré à l’animation littéraire sous la forme de présentations d’auteurs dans divers lieux de Liège. Enfin, il est aussi critique littéraire pour la revue Le Carnet et les Instants.
Site web de Karel Logist : https://karellogist.com
Bibliographie
- J’arrive à la mer, Editions de la Différence, Collection clepsydre, Paris, 2003, 128 pages. (Prix Marcel Thiry)
- Tout emporter, poèmes 1988-2008, préface de Liliane Wouters, Le Castor astral, Collection Escale des lettres, Bordeaux, 2008, 172 pages.
- Desperados, Editions L’arbre à Paroles, Amay, 2007, 86 p.
- Si tu me disais viens, Éditions Ercée, Bruxelles, 2007, 96 pages
- Force d’inertie, Le cherche-midi, Collection Domaine privé, Paris, 1996, 61 pages. (Prix du Parlement de la Communauté française)
- Mesures du possible, Editions L’arbre à Paroles, Amay, 2011, 148 pages.
- Mademoiselle Grand et Monsieur Belle, MaelstrÖm, Collection Bookleg, Bruxelles, 48 pages
- Un danseur évident. Éditions L’Arbre à Paroles, Amay, 2004, 43 pages.
- Retours. Éditions L’Acanthe, Namur, 2001
- Une quarantaine, L’Arbre à Paroles, Collection traverses, Amay, 1997, 55 pages.
- Alexandre Kosta Palamas. Éditions Les Eperonniers, collection Feux, Bruxelles, 1996, 69 pages, ISBN 2871322805
- Ciseaux carrés, L’Arbre à Paroles, Collection traverses, Amay, 1995, 40 pages.
- Le séismographe, Éditions Les Eperonniers, collection Feux, Bruxelles, 1988, 96 pages.
- Dés d’enfance et autres textes (Le séismographe et Alexandre Kosta Palamas), Bruxelles, Espace Nord, 2013, 256 pages
- Le sens de la visite. Éditions La Différence, Collection clepsydre, Paris, 2008, 90 pages
- La traversée des habitudes, 2016, éd. TETRAS LYRE
- Un coeur lent, 2019, éd. TRETAS LYRE
- Soixante-neuf selfies flous dans un miroir fêlé, Collection iF, l’Arbre à paroles, 2021